Tao Chi Qong

Tao Chi Qong

Les origines de cet art interne sont triples. Le premier courant est venu d’Inde par le Tibet, rapidement rejoint et complété par des influences mongoles et bien entendu chinoises. On attribue son arrivée en Chine au fameux Bodhidharma, un moine d’origine indienne qui vécut entre le Ve et VIe siècle de notre ère. La croyance lui attribue la diffusion effective du bouddhisme en Chine. Il en est d’ailleurs le premier patriarche. On raconte qu’il vécut au moins centenaire diffusant son enseignement jusqu’à son dernier souffle. Considéré comme le fondateur des arts martiaux chinois, Il laisse derrière lui un héritage immense dont le Tao Chi Qong n’est qu’une humble émanation.

La discipline est aujourd’hui représentée en France et au Maroc par Abdou Maghraoui qui a étudié pendant 11 ans la médecine tibéto-mongole de style Bátuó au He Nan et qui continue encore à en exercer la pratique aujourd’hui dans l’association. Celui-ci a également développé sa propre branche, le Buska. Un art complet qui, non content d’emprunter bon nombre d’élément au Tao Chi Qong, possède une identité bien à lui avec une forte dominante martiale sans oublier des séries statiques et mobiles inédites.

Philosophie de l’art

Contrairement aux arts externes, le Tao Chi Qong se marrie difficilement avec une autre pratique sportive, non pas par sectarisme mais par simple souci d’efficacité. Au démarrage de la pratique il est toujours question de réparer le corps avant de le construire, une activité annexe source de traumatisme physique entre invariablement en conflit avec cette action bénéfique. Tout est question de mesure.

Le Tao Chi Qong est avant tout un art médical qui se destine à toutes et à tous sans exception, dans un souci d’amélioration perpétuelle de sa condition physique et mentale. Son efficacité se prouve à chaque séance et ne dépend que de l’investissement personnel du pratiquant. Nous avons coutume de dire que l’on ne peut travailler à la place de l’individu. Et s’il n’y a pas de maître attitré dans notre art car nous sommes tous des disciples avec une vision et des objectifs distincts, nous sommes tous maître de notre pratique.

En somme, il aide non seulement à rester en bonne santé mais également à amener le corps vers un développement harmonieux.

Or l’harmonie ne peut se concevoir sans la notion fondamentale d’équilibre. Cette recherche de l’équilibre est la première sagesse du corps. On ne bâtit pas d’édifice solide sur des bases chancelantes. C’est pourquoi avant de pratiquer la forme du Tao Chi Qong, le disciple se doit d’effectuer un travail obligatoire de préparation du corps qu’il est difficile de quantifier dans sa durée. Nous n’avançons pas tous à la même vitesse et c’est sans importance tant que nous progressons, ce n’est pas une course mais bien un voyage.

Ce travail préparatoire démarre avec trois exercices principaux que sont le Tai chi po, la marche du crapaud et la marche du chien.

Les Formes

Le Tai chi po :

Le « pas » du Bodhidharma, constitue la base du Tao Chi Qong. Il est utilisé pour travailler la posture et l’équilibre par le déroulement lent et précis du pied. D’aspect banal cet exercice ne doit pas être sous-estimé ni négligé car il renforce et assouplit les articulations de la cheville. Il est pratiqué à chaque séance et son mouvement se complexifie au fur et à mesure. Il nous enseigne l’importance de la lenteur dans l’exécution du mouvement.

Le Long chan :

Forme du cœur par excellence, elle insiste sur le mouvement artériel et l’équilibre dans la posture. C’est une forme en torsion, c’est-à-dire que le corps exécute un pivot en maintenant son enracinement à la manière d’un linge que l’on essore. La pratique régulière permet de corriger les fragilités et les déséquilibres liés au mouvement ou à l’absence de mobilité des hanches. C’est un mouvement quasi obligatoire pendant la séance car il agit en continuité de l’échauffement et sert de bases à de nombreuses autres séries de mouvements. Il est habituellement réalisé en 5 temps mais il existe de nombreuses variations. Enfin il fait partie des formes 28 et 12 qui sanctionnent le passage du premier degré d’évolution dans la pratique.

La marche du crapaud :

Bodhidharma se serait inspiré de la gestuelle du batracien pour jouer sur la masse musculaire des cuisses, renforcer le dos et augmenter la capacité respiratoire de l’individu. Cette posture accroupie est un excellent révélateur des limites articulaires et musculaires de celui qui la pratique. Elle agit comme un révélateur des faiblesses du corps et des fragilités sur lesquelles travailler.

La marche du chien :

Bodhidharma toujours s’est inspiré du fidèle animal après avoir constaté dans ses multiples consultations les différents facteurs d’usures liés à la course à pied. En effet courir accentue les risques de lésions en raison du déséquilibre du corps penché vers l’avant et de l’impulsion du pied qui remonte le long de la jambe en passant par différents sas articulaires (genoux, bassin, colonne vertébrale) qui vont suppléer à l’effet amortisseur du cartilage. La marche du chien en revanche est une position de course qui se pratique à quatre pattes et qui permet de bien plus sécuriser les articulations tout en bénéficiant des mêmes bénéfices cardiologiques. La marche du chien est également l’unique moyen d’agir sur nos organes internes que la position quadrupède suspend dans le vide. Ceci permet d’éviter certains désordres viscéraux et stimule le système immunitaire. Enfin la marche du chien et ses nombreuses déclinaisons sont les exercices de référence pour renforcer l’articulation des genoux.

Les quatre dragons (ou 4 4) :

Il s’agit d’une forme de Buska (?) inspirée d’une base de travail issue du Tao Chi Qong. Elle se focalise sur le renforcement de la capacité respiratoire et une amélioration de la circulation sanguine en travaillant sur l’élasticité des vaisseaux par d’amples mouvements de torsions et d’extensions. L’ensemble du métabolisme est successivement sollicité par l’enchainement des postures. Bien qu’éprouvant, c’est un excellent exercice pour renforcer les muscles des jambes. Dans un second temps et après une pratique assidue un cinquième mouvement peut être ajouté pour ressentir le Chi. Le Chi est l’énergie interne que l’on peut traduire essentiellement par l’oxygénation du sang bien que le terme recouvre un aspect plus large.

L’intensité du mouvement est telle qu’il est nécessaire de l’enchainer à la forme du Tigre et ensuite à la posture de Zama que l’on appelle également la posture du dos en raison des bienfaits qui lui sont relatifs.

La marche de Yu Fu :

Cette forme nécessite l’usage d’un bâton (1.5m) qui sert d’appui lors de l’extension. C’est une forme riche qui comptes 21 séries de mouvements. Parmi les bienfaits associés à cette forme on trouve pêle-mêle un rôle de renfort des articulations, un travail de souplesse et d’équilibre efficace et progressif, une sollicitation de la prostate via l’extension maximale des segments jambiers, et enfin l’entrainement des muscles profonds et plus particulièrement des muscles paravertébraux qui assurent le bon maintien de la colonne vertébrale. L’avantage de l’appui conféré par le bâton réside dans l’accessibilité du mouvement à toutes et à tous, sans barrière d’âge ou de forme physique. Le maintien de l’équilibre est déterminant à tous les âges de la vie, tout comme la nécessité d’entrainer constamment son système cardio-vasculaire. C’est un travail fondamental qui provoque, à l’instar du Tai chi po, le mouvement dans le mouvement – c’est-à-dire un cycle métabolique vertueux où le mouvement correctement réalisé va accroitre les effets du suivant et ainsi de suite menant à une sensation agréable de relâchement dans son quotidien.

Le Di Chi à la Lune :

Cette forme basée sur le Yu Fu mais n’utilisant pas le bâton comme appui renforce d’une autre manière les organes internes et le système respiratoire par la suspension relative des viscères dans le vide. Cette forme est conseillée pour soulager le mal de dos et les douleurs articulaires du pied notamment celles liées aux orteils. L’équilibre est au centre de l’action posturale du Di Chi à la Lune. Le corps en se penchant vers l’avant et vers le bas à la manière d’une fente nous oblige à compenser le déséquilibre et ainsi à jouer sur la masse musculaire au moyen d’une succession de microgainages. La remontée du mouvement, nécessairement lente, permet de toucher une-à-une chaque vertèbre et de solliciter les muscles paravertébraux. Des muscles petits et profonds d’une grande importance pour la posture mais difficile à toucher et à maintenir en bon état sans ce genre d’exercice. Tout l’intérêt est d’obtenir le relâchement maximum pendant l’exercice. A ce titre il est important de rappeler l’importance du mouvement libre et non contraint mais également de la respiration à chaque étape du mouvement. Cette dernière s’effectue toujours et dans le meilleur des cas par le nez pour l’inspiration et l’expiration.

L’Enseignement Martial

Le Tigre :

Cette forme inspirée du Nikko, un art martial indo-malaisien partageant des origines communes avec le Pencak Silat, intégralement maitrisée par Abdou Maghraoui et propre au Buska s’établit comme la porte d’entrée du pratiquant dans le domaine martial de la discipline. Du haut de sa pratique régulière et de son onzième et ultime grade en Nikko, Abdou Maghraoui a infusé une pratique à part entière qui se focalise sur le ciblage des points vitaux et l’utilisation de nombreuses techniques de percussions. Art singulier dans sa forme et sa pratique, il nécessite à l’âge adulte entre 3 et 5 ans de pratique assidue afin de préparer le corps et l’esprit à recevoir son enseignement. Les enfants peuvent le démarrer dès l’âge de 3 ans avec un programme adapté où le principe de violence est soigneusement évité pour se concentrer sur les sensations de libre mouvement à travers l’exécution de mouvements martiaux, c’est d’ailleurs une manière ludique et efficace de les initier à la pratique du Tao Chi Qong.

Ne reniant aucunes de ses racines médicinales, l’art martial du Tigre comme son modèle totémique se traduit par l’exécution de mouvements rapides et de frappe puissantes. L’apparente brutalité des enchainements est un excellent moyen de doper sa confiance en soi et de faire reculer toujours plus les mauvais réflexes de peur qui peuvent survenir lors de situations stressantes ou d’agressions. Ainsi la pratique martiale permet d’accentuer le contrôle de soi et de libérer son mouvement et sa respiration au moment le plus critique. C’est un travail intense, difficile et de longue haleine mais les bénéfices qu’on en retire sont immenses. On parle alors de « mouvement joyeux » quand la liberté de mouvement devient totale et que l’esprit se libère de ses entraves du quotidien. Ainsi on s’absorbe dans la forme à la manière d’une transe à cela près que l’on maintient un degré de conscience plein et entier.

D’un point de vue plus prosaïque, l’accent est mis sur un renforcement de l’interne même si les exercices de renforcement physique sont loin d’être absent et sur l’utilisation complète de l’espace (y compris le sol et le saut). L’objectif final recherché est d’obtenir un mouvement agissant comme une seconde nature, proche de l’instinct et gage de son efficacité maximale.